Orthodoxie en Abitibi

Histoire de l'Église occidentale (6)

Histoire de l'Église occidentale :
quinzième et seizième siècle

Le texte présenté ici est un extrait des Notes de Cours prises lors de l'année académique 1983, par le P. Georges Leroy, lorsqu'il était étudiant à L'Institut St. Serge, à Paris. Le présent Cours d'« Histoire de l'Église occidentale » était donné par Mr. Nicolas Lossky. - Voici donc la sixième partie de ce Cours :

Cliquer ci-dessous, pour vous retrouver aux points correspondants du texte :

60) Quinzième siècle : le contexte historique.
61) L'homme nouveau du XVe siècle.
62) Le concile de Florence.
63) L'an 1500.
64) La Réforme.
65) Martin Luther.
66) Zwingle.
67) Philippe Mélanchton et Martin Bucer.
68) Jean Calvin.
69) La Réforme en Allemagne.
70) La Réforme en France.
71) La Réforme en Hollande.
72) Érasme.
73) Le concile de Trente.
74) La Réforme anglaise.

- Histoire de l'Église occidentale -
Quinzième et seizième siècle

- CHAPITRE LX -
QUINZIÈME SIÈCLE : CONTEXTE HISTORIQUE


§ 1. — Quelques dates.

Plusieurs dates et événements importants balisent le XVe siècle :

1415 : la Bataille d'Azincourt. C'est le début de la fin pour la France : Henri V d'Angleterre bat la noblesse française. Charles VI (1338 – 1380 + 1422) n'est guère maître de son royaume (notons les dates de Charles VII:1403 – 1422 +1461).

1420 : le Traité de Troyes : les Anglais sont pratiquement maîtres de la France. La Guerre de Cent Ans ne se terminera réellement qu'en 1453 ; les Anglais gardent la possession de Calais.

1431 : bûcher de Jeanne d'Arc.

1438 : Pragmatique Sanction de Bourges : il s'agit de l'accord établi avec le pape Eugène IV. C'est l'un des premiers accords signés entre la royauté française et la papauté.
En 1448, à l'autre bout de l'Europe, le métropolite Jonas est élu à Moscou. Il se produit l'autocéphalie de l'Église russe : le métropolite Jonas est élu sans en référer à Constantinople - ville qui tomba en 1453.

1456 : la première Bible est imprimée à Mayence par Guttenberg. L'imprimerie apparaît en Italie dix ans plus tard, et ensuite en Angleterre (au XVIIe siècle en Russie).

1478 : la Paix de Zurich : elle marque le début de la Suisse indépendante, qui joua un rôle important dans la Réforme. La Suisse, les Pays-Bas et Venise furent des républiques oligarchiques.

1492 : Découverte de l'Amérique par Christophe Colomb. Entre le XVe et le XVIe siècle, Ferdinand et Isabelle les Catholiques règnent sur l'Espagne. Ils sont les « témoins » du monde catholique, ce qui n'empêcha pas leurs ennuis avec la papauté.


§ 2. — La rivalité entre la papauté et les monarchies locales.

Le pouvoir civil tend à renforcer son contrôle sur l'Église catholique-romaine. Déjà au XIVe siècle, l'Angleterre connaît une opposition croissante, face à l'intervention pontificale sur le sol anglais. Les lois sur les provisions (postes réservés à la papauté, parmi les Bénéfices) et les lois de « praemunire » (1353 – 1393, le fait qu'elles durent être répétées montre bien qu'elles ne purent être respectées) interdisent à tout sujet du roi d'Angleterre de faire appel à l'extérieur - en particulier à Rome - sous peine de confiscation des biens et d'emprisonnement. Au XVe siècle, les énergies de l'Angleterre étaient monopolisées par la guerre de 100 ans. En France, en 1407, le roi authentifia la décision conciliaire qui reconnaissait l'autorité du pape, avec comme réserve le fait que l'autorité conciliaire la surpasse.

La Pragmatique Sanction de Bourges suit les décisions du concile de Bâle :
- réaffirmation du décret « Frequens » sur le concile, comme institution permanente ;
- affirmation de la suprématie du concile sur le pape ;
- le roi de France jouit d'un pouvoir politique absolu ;
- les élections dans les Bénéfices doivent être faites librement : abolition des Annates (impôt annuel) et taxes pontificales, sous réserve des besoins matériels du pape ;
- restriction des appels à Rome (comme en Angleterre) : ces appels doivent se limiter aux affaires graves et qui ne peuvent être résolues dans le royaume.

Cette Sanction sera la Charte de l'Église de France - attaquée par les papes - abolie par Louis XI, puis restaurée par le Concordat de Bologne en 1516.

En Allemagne, le Concordat de Constance (décret « Frequens ») fut signé en 1418. Ce Concordat ramena au statu quo du XIIIe siècle : c'est le retour aux élections canoniques. Pour les Bénéfices non électifs, on institue un tour entre le pape et les autorités civiles, à parts égales.


§ 3. — La Renaissance en Italie.

En 1417, avec Martin V, la papauté revint à Rome. La Renaissance naît en Italie au XVe siècle. Les papes établissent des relations diplomatiques avec tous les États d'Europe. Nicolas V fait de Rome une grande capitale culturelle, étant lui-même humaniste. Sixte IV, comme Innocent VIII, furent en quelque sorte les « champions du népotisme »… La piété tend vers l'émotion psychologique, tandis que la scolastique se fige. En Europe, domine le Nominalisme d'Occam - tandis que l'Espagne reste thomiste - la Bohème restant wycliffienne. Signalons Nicolas de Cuse qui est Allemand et platonicien - Marcile Ficin (1433 – 1491) - Pic de la Mirandole, « classiciste », qui connaissaint l'hébreu, araméen et l'arabe. Dans ce milieu platonicien, sont traduites en latin les œuvres de Platon, Plotin, Porphyre et Denys. Savonarole (1452 – 1498) - un Dominicain - fut un phénomène du XVe siècle. Il en appela à un concile pour déposer le pape, qui l'avait excommunié en 1417. Il fut torturé, pendu et brûlé… En Hollande, les Frères de la Vie Commune insistent sur la simplicité dans la vie pratique - et initient à la Devotio Moderna. Ce fut dans ce milieu qu'Érasme fut formé.


- CHAPITRE LXI -
L'HOMME NOUVEAU DU QUINZIÈME SIÈCLE


Au XVe siècle, l'individualisme surgit, avec la conscience grandissante du fait que la personne peut et doit s'exprimer par l'art, la culture et la pensée. Des artistes apparaissent - les sports commencent à être pratiqués comme un art en soi - mens sana in corpore sano - devient une réalité ; l'accent est mis sur le goût et le raffinement dans le comportement. L'accent est mis également sur la vie d'ici-bas, considérée comme étant quelque chose de bon. Dans la vie italienne, cela se traduit par une activité énorme dans le domaine culturel et artistique. Tout cela pénètre dans l'Église. Cette Renaissance italienne fut très différente de la Renaissance des pays nordiques, qui se produira un siècle plus tard. Dans les pays nordiques, on étudie le langage, la grammaire, la rhétorique, la philologie - tandis que l'Italie avait redécouvert certains idéaux païens, où tout est immanent. Dans les pays nordiques, on se tournera beaucoup plus vers les Père et l'écritures - collationnant des manuscrits (cfr. Érasme, pionnier de la redécouverte des Pères de l'Église en Occident). Le Nord reste plus médiéval que l'Italie renaissante.

Le retour du pape en Italie marqua une ère nouvelle pour ce pays. La chrétienté ressent la Turquie et les Musulmans comme un danger commun pour tous. Nicolas V est un humaniste, un amateur de Belles Lettres. Il fit beaucoup pour faire de Rome la capitale culturelle du monde. Il commença la Bibliothèque Vaticane et la reconstruction de Saint-Pierre de Rome, ainsi que de la ville elle-même. Callixte III, son successeur, fut le premier Borgia. Il se signala par son népotisme. Pie II (1458 – 1464), diplomate et écrivain, ancien conciliariste, fut néanmoins l'auteur de la Bulle Execrabilis, qui condamna ce mouvement conciliariste… Pie II fut un grand amateur de fêtes, et aménagea même la ville pour ce faire. Sixte IV (1471 – 1484), népotisme de premier ordre, donna son nom à la « Chapelle Sixtine ». Innocent VIII (1484 – 1492), père de nombreux enfants, fut fabricateur de fausses Bulles… Alexandre VI Borgia ne demande pas de commentaire. Sous son pontificat, Colomb découvrit l'Amérique. Une Bulle d'Alexandre VI divisa le monde par le Méridien passant par les Açores, répartissant les dominations européennes sur les Amériques - ce qui explique bien des guerres qui eurent lieu au cours du XVIe siècle.


- CHAPITRE LXII -
LE CONCILE DE FLORENCE


§ 1. — Le concile de Bâle.

Suivant la décision prise pendant la dernière session du concile de Constance, et en application du décret « Frequens », Martin V convoqua le concile à Pavie, en 1423. Comme la peste se déclara dans cette ville, le concile fut transféré à Sienne, le 22 juin de cette année. Le décret « Frequens » indiquait une période de sept ans entre les conciles périodiques. Le concile suivant devait donc se tenir en 1430. Finalement, Martin V convoqua le concile à Bâle, en 1431.

Le cardinal Cesarini s'occupa tout d'abord à la prédication d'une croisade contre les Hussites. Celle-ci ayant été battue à plate couture par les Tchèques, le cardinal Césarini présida le concile de Bâle, au nom du pape. Le pape dissout le concile mais les Pères de Bâle continuèrent à siéger (comme ce fut le cas à Constance, après la fuite de Jean XXIII). Césarini autant que Sigismond, roi de Bohème, tenaient à ce que le concile siège et statue envers les Hussites.

Le concile émit les Compacta de Prague, concédant aux Hussites la liberté de la prédication, le droit de châtier les pécheurs publics, et la Communion sous les deux espèces. Le concile de Bâle consentit donc à d'importantes concessions. Le pape révoqua sa Bulle, voyant la tournure que prenaient les événements.

Le concile se constitua en Nations - mettant en minorité les évêques et cardinaux. Le concile se réaffirma comme étant l'autorité suprême. Par un décret, le concile restreint le droit d'appel au pape ; par un autre décret, il supprime les taxations de la Curie. Eugène IV proteste.

Sigismond est inquiet de l'avance turque : la Serbie, la Bulgarie et les abords de la Hongrie - c'est-à-dire l'Empire de Sigismond - sont menacés. Il encourage les négociations avec les Grecs. Jean VIII Paléologue recherche l'aide militaire de l'Occident. Où tenir le futur concile œcuménique ? Les Grecs sont d'accord pour aller hors de Constantinople, mais en Italie, car Bâle se trouve dans l'Empire d'Occident. Cette question opposa Eugène aux Pères de Bâle, qui voulaient que le concile se passe à Bâle ou à Avignon. Une minorité, avec Cesarini, se rallie au pape. Eugène IV envoie une flotte à Constantinople. Bâle fait de même. Jean VIII prend le bateau italien, à destination de Ferrare.


§ 2. — Le concile de Ferrare.

Le pape transfère le concile de Bâle à Ferrare. La majorité des Pères de Bâle refuse. Le 8 janvier 1438, le concile de Ferrare est ouvert. Les Grecs n'arrivent qu'en mars. L'empereur de Constantinople temporise, pour qu'arrivent les ambassadeurs des pays dont il espère l'aide militaire. Les discussions piétinent, notamment concernant la question du purgatoire. Isidore, Métropolite de Kiev, parvient au concile. On se met à discuter sur l'ajout du filioque. Mais là se pose un problème financier : la ville de Florence fait une offre au pape, qui accepte. La peste se déclara à Ferrare : on déménage à Florence le 10 janvier 1439.


§ 3. — Le concile de Florence.

Lors du concile de Florence, Marc d'Éphèse défend intangiblement la position orthodoxe. Bessarion persuade les Grecs d'accepter l'explication : « l'Esprit procède du Père et du Fils comme d'un seul Principe ». Ils s'accordent le 8 juin. Le 9, le patriarche de Constantinople décède. Finalement, la primauté de Rome est reconnue comme « spirituelle », et le pape est reconnu comme Pasteur universel et Vicaire du Christ. Le traducteur des Actes grecs du Concile, Abraham de Crète, évêque du XVIe siècle, catalogua ce concile comme huitième concile œcuménique. Au XVIIIe siècle, dans le catalogue des conciles, cette « erreur » a été corrigée…

La signature de l'accord avec les Grecs marque la victoire d'Eugène IV sur Bâle et sur la théorie conciliariste. Les Bâlois « déposent » Eugène IV et élisent Félix V. Le pape s'allie avec les soutiens de Bâle. Enfin Félix V abdique en 1445, et le concile de Bâle se dissout. Dans un certain sens, c'est grâce aux Grecs que le pape a remporté la victoire sur les conciliaristes ! L'aide militaire de l'Occident se concrétisa par l'entreprise d'une croisade. La défaite de Varna en Bulgarie (mort de Césarini et de Ladislas) fut la porte ouverte à la prise de Constantinople. Constantin XI échoua à maintenir l'Union. Gennade Scholarios, patriarche de Constantinople, va vivre la chute de sa ville. En 1484, l'Union fut dénoncée par un Synode de Constantinople.


- CHAPITRE LXIII -
L'AN 1500


Le concile de Constance (1414) et les conciles de Bâle, Ferrare et Florence (1431) avaient tenté de régler les problèmes des mœurs, de l'organisation de l'Église, des Cours de Justice, etc... Ces conciles ont réussi dans le domaine de la papauté - mais échoué dans le domaine de la vie de l'Église. Mais ces conciles ont semé dans les esprits des idées de réformes.

Vers 1500, ces idées sont devenues largement répandues en Occident : tous pensent qu'il faut faire quelque chose dans le domaine de la Réforme de l'Église. Dans la grande masse des consciences, il ne s'agit pas de réforme doctrinale - la doctrine est ressentie par l'immense masse comme étant immuable. Les Lollards et autres sont considérés comme séditieux par rapport à l'ensemble de l'Église. L'esprit de réformes se développe, mais sous le point de vue administratif, juridique et moral.

Il y a aussi une tendance à plus d'évangélisme qu'auparavant. Mais ce n'est pas encore une mise en cause de la doctrine ambiante. On se pose des problèmes sur ce paradoxe du mélange des pouvoirs, dans la personne du pape. En 1510, une commission se réunit à Tours pour traiter de la question de la validité de l'excommunication lancée par le pape sur un souverain ayant résisté aux armées papales. Il y a déjà une attitude critique en face de cette question.

L'idéal monastique traditionnel - idéal de l'au-delà et du rejet du monde - qui marquait toute la prédication antérieure, prend de plus en plus de distance, en face de la montée de la conscience de la bonté de l'univers d'ici-bas, et du confort d'y vivre. Il n'y a plus de personnages comme saint François, pour appuyer l'idée de pauvreté.

On idéalise une « Église primitive » assez mythique ; on critique l'état présent, au nom d'un Âge d'Or de l'Église - rêve d'un passé perdu et magnifique - dénonçant avec toujours plus d'insistance le matérialisme de l'Église. De plus en plus, on rapporte ce matérialisme à la Donation de Constantin.

Au XVe siècle, l'Esprit historique un peu plus critique se développe : le fait que la Donation est un faux fut dénoncé à cette époque. Érasme croyait dur comme fer que la pureté de l'Église était plus grande dans le passé. Une opinion publique naît, et atteint le prestige des gens en place. L'anticléricalisme naît également.

L'état académique de l'idée de Réforme se métamorphose en une revendication populaire. L'exécution de Savonarole fut le symbole de l'échec des réformes. La pratique religieuse est à l'époque extrêmement répandue. Henri VIII assistait à trois ou cinq messes par jour ! Sa belle-sœur, Margaret Beaufort, six par jour… Ce n'est pas une sanctification du temps, mais le besoin de multiplier la répétition du Sacrifice du Christ. C'est du domaine de la piété populaire.

Le rosaire se popularisa ; les « Pieta »,le Chemin de Croix, la pratique de l'Angélus, le culte hypertrophié des Saints et des reliques se développent. Le fossé qui sépare la religion des lettrés de la piété superstitieuse, s'élargit. Entre 1457 et 1500 il y a plus de cent éditions de la Bible.

Du point de vue doctrinal, sommes en bout de course de la théologie scolastique. La théologie d'école s'écarte toujours plus de l'expérience spirituelle. L'Augustinisme franciscain, globalement plus spirituel, fournira bien des paroles à Luther.

Dans le domaine liturgique, se fait sentir un énorme besoin d'une simplification de l'extrême complexité liturgique. Il ne faut pas croire que la simplification de la liturgie soit uniquement le fait du protestantisme - c'est dans la mouvance de tout mouvement réformiste.

Le pouvoir des gouvernements locaux s'affermit. Le gouvernement se modernise. L'organisation de l'État se constitue, au sens moderne du terme. Une certaine idée de la Nation vient au jour. En Angleterre et au Danemark, la Réforme a eu lieu parce que la limitation du pouvoir de l'Église et du pape était nécessaire pour l'établissement d'un système étatique efficace : c'est la fin de l'âge féodal. Cette limitation avait certes commencé avant 1500.

En 1478, le pape donne aux Souverains d'Espagne le contrôle de l'Inquisition - sans appel à Rome possible. Après 1531, ce pouvoir est même accordé sur les évêques.

En 1516, le Contrat de Bologne est signé entre François Ier et Léon X. Ce document détermine les relations juridiques entre la papauté la France : le roi obtient le droit à toutes les nominations ecclésiastiques - et les appels à Rome sont sévèrement limités. Le Concordat dura jusqu'en 1789.

Le Monarque anglais avait dès le XIVe siècle la possibilité d'envoyer le « congé d'élire » avec le nom d'un candidat, pour un siège épiscopal. Le droit de nommer les évêques est même obtenu par des souverains faibles comme Frédéric III, les rois d'Écosse, etc... Lentement mais sûrement, la papauté perd le contrôle effectif des Églises dans les différents États.

La Réforme ne fut pas toujours le moyen pour un prince d'affermir son pouvoir, mais le moyen de se libérer de la tutelle d'un souverain étranger. Les gouvernements sont ressentis comme capables de trancher des nœuds gordiens, où l'autorité de l'Église n'aurait pas suffi. L'idéal de l'Unité de la chrétienté s'amenuise. Les Nonces pontificaux s'installent progressivement dans les principales capitales, ce qui sera chose faite au XVIe siècle.

L'éducation des classes aisées se développe, à cause de la diffusion des livres. La Réforme n'est pas sans rapport avec l'esprit humaniste, mais n'en est pas le résultat. Il y a plutôt concomitance que rapport de cause à effet. C'est davantage un mouvement de foi que de raison.


- CHAPITRE LXIV -
LA RÉFORME


La Réforme commence en Allemagne, pays morcelé en une infinité de principautés - où l'Empire était faible. Tout démarre à cause des problèmes financiers de la papauté. On augmente le prix des dipenses - prix qui sont eux-mêmes gonflés par les intermédiaires. Dans la conscience populaire, c'est le pape qui est tenu comme responsable. Venise a pour revenu annuel un million de ducats. Le pape en a 500 000, avec une obligation de dépense bien supérieure à celle de Venise ! Les banques prennent une importance croissante en Europe, tels les Médicis de Florence, et la banque Fugger à Augsbourg. Les banquiers sont les créanciers du pape, des archevêques et des rois.

Albert de Brandebourg, archevêque de Mayence et de Magdebourg (où se trouve Wittenberg) et de Halberstadt a besoin de dispenses pour permettre tous ces cumuls. Il est débiteur de la banque de Fugger. En guise de sécurité, il entreprend la proclamation en ses territoires de l'Indulgence proclamée par Jules II en 1572. C'est l'ancêtre des campagnes publicitaires : il s'agit de prêcher cette indulgence. Une partie de l'argent récolté ira au pape, une autre partie ira à Fugger. Le Dominicain Tetser va se charger de la prédication. Mais l'un des Princes Électeurs Frédéric le Sage, prince de Saxonie, interdit l'Indulgence sur son territoire, désireux de se défendre contre l'influence grandissante de la famille de Brandebourg - et ne voulant pas voir partir des devises. D'autre part, cette Indulgence ferait concurrence à celle accordée par les nombreuses reliques dont il était lui-même propriétaire : au château de Wittenberg, il y avait 17 433 reliques !


- CHAPITRE LXV -
MARTIN LUTHER


§ 1. — Les 95 Thèses contre les Indulgences.

Né en 1483, Martin Luther fut professeur d'Écriture sainte à l'université de Wittenberg. Il est troublé par la doctrine et la pratique des Indulgences. Le 31 octobre 1517, à l'âge de 34 ans, il va placarder à la porte de l'église du château de Wittenberg 95 thèses contre les Indulgences, et se déclare prêt à les défendre. Dans un sermon sur la grâce et les Indulgences, il informe le peuple. Du plan universitaire, il passe au plan ecclésial. Dans les 95 thèses, Luther n'est pas antipapiste. Mais il souligne le scandale qu'est le fait de demander de l'argent au peuple, le pape « étant l'homme le plus riche du monde ». Mais il reste convaincu que le pape s'opposerait à tout le trafic fait en son nom.

D'origine paysanne, Luther en est très fier. Forces de la nature, à l'esprit vigoureux direct, il parle un langage rude et cru ; il aime la plaisanterie - son père était un mineur de cuivre. Luther étudia le Nominalisme de 1501 à 1505, à Erfurt. Il chantait ténor, jouait du luth et avait un talent musical. Il eut une « expérience spirituelle » pendant un orage. La suite de ce « coup de foudre » il fit un vœu, et entra en 1505 au couvent des Augustiniens. Il devint prêtre en 1507. Il étudia saint Augustin, et n'est guère attiré par l'aristotélisme et la scolastique. Il n'est pas un érudit ni un homme d'études. Avant 1516, il est tenant de plus de simplicité, au point de vue théologique, et veut retourner aux « Pères », c'est-à-dire saint Augustin et les Pères latins. Les augustiniens sont généralement pessimistes quant au destin de l'homme. Luther a intériorisé cette peur de la mort et du péché. Il est pris de scrupules de conscience de plus en plus violents - sentiment d'être rejeté par Dieu - et il est obsédé par la justice de Dieu. Son confesseur lui conseille d'approfondir saint Paul. Il se concentre, de 1513 à 1518, sur l'Épître aux Romains. Il a la révélation de la « Justice imputée de Dieu ». Luther est obnubilé par le fait que l'homme est pécheur, même après le baptême - donc Dieu ne peut que punir l'homme, car Il est juste par Nature (c'est un raisonnement typiquement scolastique). La justification de l'homme ne peut être que la foi : le juste vivra par la foi (Romains 1 ; 17). La foi est un don de Dieu, et par là, la Justice de Dieu sauve l'homme. C'est l'embryon de la future doctrine de la « Sola Fide ». Dieu impute à l'homme la justice du Christ. La foi vient de la grâce, et le pardon est un don gratuit. Les œuvres sont inutiles, non qu'il ne faille pas les faire ; mais on ne peut s'appuyer sur elles pour le Salut. Les Indulgences représentent, par définition, le fait de compter sur les œuvres.

L'archevêque Albert de Mayence transmet les 95 thèses au pape. Les Dominicains accusent Luther d'hérésie, pour avoir mis en cause le pouvoir du pape. Luther est soutenu par le prince Frédéric de Saxe. La Diète d'Augsbourg (1518) est saisie du problème. Le légat du pape, le cardinal Cajetan, y siège. Luther refuse de se rétracter. Il quitte Augsbourg de nuit.


§ 2. — Luther et la papauté.

Luther attaque les fondements doctrinaux de la papauté et l'infaillibilité du pape. Léon X envoie chez Frédéric de Saxe un émissaire qui persuade Luther d'écrire une lettre au pape. Luther étudie l'Histoire de la papauté, et démontre que l'Indulgence n'a aucun fondement scripturaire. Il conclut que le pape est inférieur au concile dont il est le serviteur. En 1519, un débat public à Leipzig se passa entre Luther et Jean Heck. Ce dernier accusa Luther d'être disciple de Jean Hus, brûlé par la décision d'un concile. Luther défend certaines thèses de Hus. Heck s'attaque à la thèse de Luther sur l'infaillibilité du concile : celui de Constance ayant condamné Hus, tout en ayant eu tort de le faire.

En février 1520, Luther se rend compte de l'incompatibilité entre l'appareil de l'Église romaine et les Écritures : « nous sommes tous des Hussites : Augustin, saint Paul, etc... ». Il écrivit sa « Lettre à la noblesse chrétienne de la Nation allemande sur l'amendement de l'État chrétien ». Il en appelle à réformer l'Église en vertu du sacerdoce universel. Il écrivit ensuite le traité « De la captivité babylonienne de l'Église » et « De la liberté du chrétien ». Dans son traité « Contre les sept sacrements », Luther reconnaît trois sacrements dont la pénitence - tout en attaquant très violemment la pratique de la confession. Ce traité trouva sa réponse en un traité écrit par Henri VIII. Le traité « De la liberté du chrétien » reformule la doctrine de la justification par la foi - contre le pape. Dans sa « Lettre à la noblesse », il dit que « tous les chrétiens appartiennent au sacerdoce, et il n'y a d'autre différence que celle de fonction ».

Le 15 juin 1520, est publiée la Bulle « Exurge Domine », qui condamne 41 propositions luthériennes, et qui ordonne que l'on brûle les œuvres de Luther. La Bulle est publiée en Allemagne par Jean Heck, mais elle rencontre des oppositions. Le 10 décembre 1520, devant la foule, Luther, à Wittenberg, accuse le pape d'être l'Antéchrist et brûle la Bulle papale. Trois semaines plus tard, Luther est excommunié et devient le symbole de l'antipapisme en Allemagne. Charles-Quint convoque Luther à la Diète de Worms, et lui donne un sauf-conduit. Devant l'Empereur, on demande à Luther de se rétracter - il répond qu'il ne le fera que contraint par l'Écriture elle-même. Il est banni de l'Empire.


§ 3. — La traduction des Écritures en langue usuelle.

L'Électeur de Saxe, Frédéric, le fait kidnapper, et le cache à Wartburg. Luther y commença la Bible en allemand, et traduisit le Nouveau Testament en dix semaines ! L'Ancien Testament sera traduit douze ans plus tard. Luther est aidé dans ce travail par Philippe Melanchton. Ce fut aussi à Wartburg qui lança son encrier à la tête du démon. Il y resta 10 mois. Il y rédigea aussi le « Commentaire sur le Magnificat », texte très intéressant, rédigé sous forme de prière. Il écrivit contre la Confession, contre les vœux monastiques et contre le célibat des prêtres.

À Wittenberg, Les doctrines luthériennes sont abondamment prêchées, notamment par Philippe Mélanchton. Le 25 décembre 1521, un professeur simplifie la Messe et distribue la communion sous les deux espèces. En 1522, les revenus ecclésiastiques sont confiés à des laïques. En mars 1522 Luther vient à Wittenberg, en habit augustinien, et dénonce la violence, les émeutes et les excès. Il reprend ses cours. En 1523, il approuve une liturgie simplifiée.


§ 4. — La guerre des paysans (1524 – 1525).

L'Allemagne est un territoire où le pouvoir impérial est faible : on y voit souvent des révoltes de paysans. Elles sont anticléricales, menées par des soldats démobilisés ou des chevaliers ruinés. Les soulèvements réclament la liberté en face des seigneurs, le droit de choisir leur pasteur, et la restitution au village des terrains communaux, annexés par le seigneur ou l'Église. Les revendications sont essentiellement sociales et économiques, quoique mêlées à des éléments purement religieux. Les incendies de châteaux et de couvents se multiplient. La révolte est écrasée en Saxe, puis dans toute l'Allemagne. La répression brutale renforce la position des princes. Pendant la révolte des paysans, Luther a voyagé en prêchant la non-violence. Il écrivit un pamphlet contre les paysans. En fait, Luther a éveillé la conscience allemande. Un courant anti-luthérien surgit, par crainte de la révolution. À partir de 1524, Érasme devient farouchement hostile à Luther. Son ami et confesseur, Staulpit, refuse une Réforme qui menace l'unité de l'Église.

En 1529, une Diète se réunit à Speyer, et les princes se divisent en un groupe majoritaire, qui veut se soumettre à la papauté - et un groupe minoritaire, favorable à la Réforme. Ce groupe publie une « protestation », d'où vient le mot « Protestant ». Ils établissent le droit d'organiser des Églises nationales. La ligue de Smalkald (1531) est une ligne politique et militaire, qui rassemble ces princes protestants.

Charles-Quint est en guerre à la fois contre la France et contre le pape. En 1527, l'armée impériale occupe Rome, et le pape est prisonnier. C'est pourquoi Henri VIII ne put obtenir son divorce - le pape n'était pas libre : il était sous la coupe de Charles-Quint. En Europe, bien des catholiques préfèrent une Allemagne divisée, et protègent les Protestants, tout en exécutant ceux-ci sur leur territoire : Henri VIII en est un cas évident : il s'allie avec les princes protestants, tout en brûlant les Réformés en Angleterre…


§ 5. — Les caractéristiques du luthéranisme.

Le principe directeur est la Justification par la Foi. On peut aussi noter l'insistance sur la présence de la Bible en Allemand dans les églises - et qu'elle soit lue en langue vernaculaire dans les Offices. Le mariage des prêtres, la possibilité pour les moines de quitter leur monastère, la suppression des rites non spécifiés dans la Bible et l'usage d'hymnes en langue allemande sont divers aspects du mouvement. Luther débarrasse la Messe de tout langage sacrificiel, l'établit en Allemand, avec la Communion sous les deux espèces. L'élévation de l'hostie est conservée, ainsi que les ornements. Il n'y a pas un rejet absolu du Latin : cette langue peut être conservée dans les milieux « éduqués ». Personne n'a conscience de fonder une nouvelle Église : Luther et Mélanchton sont conscients d'être dans l'Église de toujours, et de la purifier d'abus récents.


§ 6. — La Confession d'Augsbourg.

La Confessio Augustana (1530) est la base confessionnelle de l'Église luthérienne. Mélanchton en fut le principal rédacteur. De 1534 à 15 184,100 1000 exemplaires de la Bible furent publiés à Wittenberg. Le « Grand Catéchisme » et le « Petit Catéchisme » de Luther popularisèrent la doctrine. En 1524, Luther épousa une ex-moniale, dont il eut plusieurs enfants. En 1526 furent publiés les « propos de table ».


- CHAPITRE LXVI -
ZWINGLE


Zwingle (1484 - 1531) est pratiquement contemporain de Luther. Né en Suisse, il fit des études à Berne, à Vienne et à Bâle. Prêtre en 1506, il s'adonne à la pastorale pendant dix ans. De 1513 à 1518, il est aumônier militaire dans la Grande Suisse. Il participe à la bataille de Marignan. Humaniste, il connaît le Grec et les écrits des Pères. En 1518, il est élu prédicateur à la cathédrale de Zurich, et y demeura jusqu'à sa mort. Dans ses sermons, il attaque le purgatoire, monachisme et l'intercession pour les morts. Il préconise la libération des croyants de la papauté et de l'évêque. Pour lui, l'Évangile est le seul fondement de la vérité. Il rejette l'invocation des Saints, les périodes de jeûnes, le célibat des prêtres.

Il est soutenu par le Conseil de la ville de Zurich. Le Chapitre de la cathédrale est réorganisé sans autorité épiscopale. En 1524, Zwingle fait célébrer son mariage dans la cathédrale de Zurich. Dans son « Commentarius de vera et falsa religione », il donne le sens le plus faible à l'Eucharistie. Zwingle entre en conflit avec Luther sur la Présence réelle : Zwingle rejette toute forme de Présence dans l'Eucharistie.

Le mouvement de la Réforme suisse zwinglienne s'étend sur plusieurs Cantons. En 1531, Zurich est attaquée. Zwingle est tué pendant la bataille, en 1531. Depuis 1515 (bataille de Marignan), Zwingle est titulaire d'une pension du pape - et l'encaissera jusqu'à la fin de sa vie. Il est en relation avec Érasme. Zwingle a une attitude critique envers les Écritures. Il réduit le mystère à une sorte de philosophie du Christ. Pour lui, la Loi est l'expression de la Vérité éternelle de Dieu - et non point la grâce, ni la mort rédemptrice du Christ. Pour Zwingle, si une coutume n'est pas explicitement prescrite par l'Écriture, elle n'est pas admise. Cela entraîne le plus grand dépouillement. Dans l'ensemble, Zwingle, comme intellectuel et humaniste, est rationalisant.

Selon Zwingle, Les sacrements sont au nombre de deux : le Baptême et la Cène - ils sont sans aucune efficacité propre : ce sont des signes, dans le sens le plus faible du terme. Le pouvoir est entièrement remis au Conseil de la ville de Zurich (1522 – 1525). Zwingle représente le point de vue le plus radical de la Réforme. Cela suppose une distinction ABSOLUE entre le matériel et le spirituel ; ce sont deux catégories qui sont absolument étrangères l'une à l'autre, notamment en ce qui concerne l'âme et le corps : l'homme est sauvé dans son âme. On rejette toute idée qu'un objet matériel quelconque puisse être le véhicule de quelque chose de spirituel : on ne peut pas physiquement recevoir quelque chose de spirituel - seule la foi peut le recevoir. Cette doctrine est fondamentalement différente de celle de Luther. En 1529, lors du Colloque de Marbourg rassemblé par Philippe de Hesse, Luther, Zwingle, Mélanchton et d'autres ne parviennent pas à s'accorder, à cause de la question eucharistique. Les Pays-Bas et les villes du Rhin vont suivre Zwingle, avec Zurich comme centre.

Bullinger (1504 – 1575) succède à Zwingle la tête de la réforme zurichoise. Il influencera la Réforme anglaise, sous Édouard VI et Élisabeth.


- CHAPITRE LXVII -
PHILIPPE MÉLANCHTON ET MARTIN BUCER


§ 1. — Philippe Mélanchton (1497 - 1560).

Mélanchton - Schwarzert de son vrai nom - était apparenté par sa mère à Reuchlin, hébraïste de renom pour la période de la Renaissance. De 1509 à 1512, Mélanchton étudia à Heidelberg puis à Tübingen et en 1518, il arriva à Wittenberg, comme professeur de Grec - dans l'esprit de la Renaissance. Il traduisit l'enseignement de Luther, sous forme de théologie systématique. En 1519, il prend part à la « Disputatio » de Leipzig, et devint en 1521 le chef de file des réformistes, à Wittenberg. Il écrivit les « Loci Communes », première présentation systématique de la doctrine de la Réforme. En 1530, il est le principal rédacteur de la Confession d'Augsbourg. À la différence de Luther, il est un homme calme, conciliant et académique. Il est prêt à accepter la papauté, avec certaines réserves. Il participa à l'organisation de l'Église semi-épiscopale de Saxe. Mélanchton est l'auteur de manuels pour les étudiants. Il explique les textes scripturaires comme des textes « classiques ». C'est le début de l'approche historico-critique des Écritures.


§ 2. — Martin Bucer (1491 - 1551).

Bucer (Butzer) fut d'abord Dominicain (1506). Il correspondit avec Luther. En 1521, il fut dispensé de ses vœux monastiques par le pape. Il est l'un des premiers prêtres mariés parmi les Réformateurs allemands. En 1523, il prêche la Réforme en Alsace. Il est excommunié par l'évêque de Spire. Ses idées évoluent. Tout d'abord, il se rapproche de Zwingle - puis ensuite de Luther. Après la mort de Zwingle, Bucer devint l'un des chefs de file des Églises réformées de Suisse et d'Allemagne du Sud. En 1549, Bucer revint en Angleterre. Le successeur d'Henri VIII, Édouard VI, n'a que dix ans. Le Conseil de Régence appelle des personnes du continent, pour enseigner la Réforme. Bucer a une grande influence sur Cramer, archevêque de Cantorbéry, qui effectuera la Réforme.

L'influence de Bucer se fait dans un sens modérateur : Bucer est l'auteur de l'Ordinal anglais (1550). Le « Book of Common Prayer » est sorti en 1549. Alors qu'ils fut plusieurs fois modifié, l'Ordinal n'a pas changé. En 1551, Bucer meurt en Angleterre, et est enterré en l'église de Cambridge. Mais sous Marie Tudor, les restes de Bucer furent exhumés et brûlés.

Bucer, comme Zwingle, est convaincu de ce qu'il est impossible de recevoir un don spirituel de façon corporelle. Mais il s'accorde avec Luther en ce qui concerne la participation du croyant à l'humanité du Christ. Il élabore cette formule synthétique : « le don divin n'est pas donné sous les formes du pain et du vin, mais dans une union indissoluble avec eux » (c'est la doctrine luthérienne de la consubstantialité, avec la négation zwinglienne). Bucer donne raison aux deux. C'est la doctrine « réceptionniste » : c'est la réception dans la foi qui fait la réalité de la participation du croyant. Cette doctrine réceptionniste sera la doctrine classique du protestantisme non-luthérien ; elle sera la base de la doctrine calviniste. Bucer aura été le maître à penser de Calvin.


- CHAPITRE LXVIII -
JEAN CALVIN (1509 - 1564)


§ 1. — Calvin – sa vie, son œuvre.

Genève est devenu protestante en 1535, par l'action de Guillaume Farel, Réformateur français, disciple de Lefèvre d'Étaples. Guillaume Farel est envoyé à Genève par Berne, pour libérer les Genevois de leur évêque. Ce fut une Réforme violente, faite par la force. Genève devint indépendante, sous la protection de Berne. En 1536, fuyant Paris et en route vers Strasbourg, Calvin passe par Genève, et Farel le retint.

Né à Noyon en Picardie, Calvin reçoit la tonsure à 12 ans, pour percevoir un Bénéfice. De 1523 1528, il étudia la théologie à Paris, sans grand enthousiasme. Il quitte Paris pour étudier le Droit à Orléans et à Bourges. Il y rencontra des Protestants. En 1532, il écrit un commentaire latin sur le « De Clementia » de Sénèque. En 1533, une expérience religieuse lui fait sentir la mission de purifier l'Église. Il rompt avec l'Église de Rome. En 1534, il refuse son Bénéfice, revenant à Noyon. Il doit fuir à Bâle. En 1536, il publie les « Institutions Chrétiennes » (en Latin). Il cède aux instances de Farel, et reste à Genève ; il y est prédicateur et professeur de théologie. Il écrivit ses « Articles sur le gouvernement de l'Église », en 1536. Il y instaure des règles très sévères pour l'admission à la communion. Il exige une profession de foi obligatoire, sous peine d'exil. Ce serment est accepté en 1538, année où il instaure la discipline de l'excommunication. Calvin et avec lui Genève refusent de s'aligner sur la pratique de Berne. Farel et Calvin sont expulsés de Genève. De 1538 à 1541, Calvin devint le pasteur de la communauté française de Strasbourg ; il s'y lie avec Bucer.

En 1539, paraît une nouvelle édition des « Institutions », influencée par Bucer. Calvin écrivit aussi un commentaire sur l'Épître aux Romains. Il rencontra Mélanchton à Ratisbonne. En 1541, son parti a repris le dessus à Genève ; il y revint. À Genève, s'instaure un austère régime théocratique et vétéro-testamentaire. Le gouvernement de l'Église se fait par des pasteurs, docteurs, anciens et diacres, assistés d'un Consistoire constitué de ministres et de laïcs, qui jugent la morale de la ville : c'est la « discipline genevoise », qui règne sous peine d'excommunication. Les « plaisirs » sont interdits. L'opposition des « libertins » est détruite par la force, c'est-à-dire par des exécutions et des tortures. En 1555, toute résistance est vaincue à Genève, ce qui permet à Calvin de s'occuper d'autres communautés. À la mort d'Édouard VI, les exilés d'Angleterre viennent à Genève. Calvin soutient les Protestants de France. Il commente les Écritures. En 1552, il publie son « Traité sur la Prédestination ». En 1559, Calvin fonde l'Académie de Genève. Son influence s'étend. Ses Institutions resteront la plus haute autorité pour les Protestants non-luthériens.


§ 2. — La Doctrine calviniste.

L'Écriture comme seule règle de foi, la négation du libre-arbitre après la Chute et la justification par la foi sans les œuvres, sont des principes communs à toute la Réforme. Par contre, le caractère inadmissible (indélébile) de la grâce, la certitude du Salut pour les Élus et la prédestination absolue sont des doctrines spécifiquement calvinistes. Celles-ci sont accompagnées d'une pratique des sacrements et d'une ecclésiologie originales.

Dans le Calvinisme, la Chute est voulue par Dieu. Après la Chute, l'homme ne peut vouloir que le péché. Toute œuvre strictement humaine n'est rien d'autre que péché. Seul le mérite du Christ rachète les œuvres. Le mérite du Christ peut être imputé à l'homme. La foi va au-delà de la certitude de la Justification ; elle va jusqu'à la certitude du Salut éternel. L'accent est placé sur l'omnipotence divine ; c'est une toute-puissance soulignée à un tel point que l'action de Dieu en est - en quelque sorte - déterminée. À l'extrême, avant même la Création, dans son dessein éternel, Dieu a prédestiné les uns à la damnation, les autres au Salut : il s'agit de la « double prédestination ». Ce sont les « supralapser » (au-dessus de la Chute). Les « sublapser » (en-dessous de la Chute) voient en la prédestination un effet de la Chute. - Au début du XVIIe siècle, au sein du Calvinisme, est apparue une réaction due au théologien Armenius (il s'agit de l'Arménianisme). Ce théologien fut le promoteur du « sublapsianisme ». En fait, saint Paul ne parle que de la prédestination au Salut.

Calvin est adepte d'un papo-césarisme : l'État doit être soumis à l'Église. Du point de vue eucharistique, c'est un réceptionnisme à mi-chemin entre Luther et Zwingle. Le fidèle communie au Christ par la foi et dans son âme ; les éléments ne sont qu'un signe extérieur.


§ 3. — La propagation du Calvinisme.

Outre les « Institutions », la Constitution Helvétique de 1566 est le documents de base. Les Huguenots, Protestants français, sont calvinistes. Le Calvinisme, en 1622, devient religion d'État en Hollande. L'Écosse, avec John Knox, est très calviniste. C'est sans doute le calvinisme le plus rigide qui soit. Knox - étant à Genève sous la persécution de Marie - commis l'erreur de sa vie en écrivant un traité intitulé : « De la monstruosité du gouvernement des femmes » (!) - ce qui fit qu'il ne peut établir de contact avec Élisabeth, en qui tous placés beaucoup d'espoir. Il ne put jamais mettre les pieds en Angleterre, où il aurait pu faire des ravages, par sa fougueuse prédication.
Au fur des siècles, tous les contacts des Réformateurs avec l'Orthodoxie ont toujours avorté, car les interlocuteurs orthodoxes n'ont jamais saisi l'enjeu du problème. Cela provient du fait qu'ils ne sont pas passés par la scolastique, au sens étroit du terme.


§ 4. — La Confession d'Augsbourg (1530).

La Confession d'Augsbourg se voulait un texte de conciliation. Comme ce texte fut pas accepté, il devint un texte limitatif de référence, contre lequel on en écrira d'autres - du genre de ceux qui furent élaborés au concile de Trente.

Le premier article nous expose la foi en la Trinité, montrant l'état de la doctrine trinitaire au XVIe siècle, à la fois très orthodoxe, et avec une tendance marquée vers l'essentialisme.

Quant au Péché Originel, on saute de l'idée que « tous ceux qui ne sont pas baptisés sont damnés » - au rejet du Pélagianisme absolu. Il n'y a aucun moyen terme entre Augustin et Pélage : « il n'y a par Nature en l'homme ni vraie foi, ni crainte de Dieu ». La question se pose sur le sens du mot « Nature ». C'est comme si Dieu avait créé toute chose une fois pour toutes - chose qui échappent ensuite totalement à l'emprise du Créateur. Or dans le Livre des Actes, c'est par les œuvres (prières, jeûnes et aumônes) que Corneille reçoit l'Esprit, avant même qu'il ne soit baptisé. Ainsi l'Esprit est-il déjà mystérieusement présent en Corneille, avant le baptême.

Selon Aristote, la Nature est autonome. Pour le Chrétien, le tropisme de la Nature véritable, la porte vers Dieu. Il ne saurait exister de séparation absolue entre Nature et Grâce. L'Article 4 sur la Justification nous met au cœur du problème : « nous ne pouvons obtenir justice devant Dieu par nos mérites, mais seulement par foi et par grâce ». C'est très ramassé. Cela paraît, ainsi présentée, inattaquable. Mais si nous poussons les termes à l'extrême, cela devient contestable, car tout est certes à Dieu - mais ce raisonnement est basé sur la notion de mérites, ce qui est une problématique typiquement scolastique.

L'Article 5 porte sur la prédication. Les Anabaptistes qui sont condamnés, en tant qu'hérétiques, quels qu'ils soient, sans excepter l'Église romaine. L'Article 6 traite de la « nouvelle obéissance ». Il qui est précisé que « la foi qui nous sauve doit mener à l'accomplissement de toutes sortes de bonnes œuvres, sans pour autant mettre en elle l'espérance d'être sauvé ». Tout cela pourrait être considéré d'une façon constructive, et non dans l'optique d'une controverse. L'Article 7, qui traite de l'Église, dit qu'elle est l'assemblée de tous les croyants parmi lesquels l'Évangile est prêché - et les sacrements dispensés conformément à l'Évangile. Tout dépend d'où est placé l'accent : sur l'Évangile ou sur l'Eucharistie.

À l'époque de Luther, il est encore admis que l'Écriture fait un tout, et que l'Évangile en est la clé. C'est l'exégèse christologie traditionnelle des Écritures. Ensuite, avec la critique textuelle, se développera petit à petit une lecture de l'Ancien Testament en soi, historique, et strictement non-messianique. Pour Luther, la « Sola Scriptura » est l'Écriture tout entière, avec la clé d'interprétation christique. - Plus tard, on aboutira à la « christologie selon Mathieu », « selon Luc », etc... Il n'y a plus que des individualités, et la question d'authenticité devient, à ce moment, essentielle.

L'article 10 donne des précisions sur la Sainte Cène : « le vrai corps et le vrai sang du Christ sont véritablement présents et distribués sous les espèces du pain et du vin ». Luther affirmait l'objectivité de la Sainte Cène. Calvin rejette l'idée de présence charnelle et historique du Christ dans la Cène, s'opposant aux les excès de Paschase Radbert. Les Calvinistes iront très loin dans ce sens.


- CHAPITRE LXIX -
LA RÉFORME EN ALLEMAGNE


L'Empereur cherche à rétablir le Catholicisme, tandis que les Princes protestants s'efforcent de résister. En 1555, la paix religieuse d'Augsbourg établit de fait le principe : « cuius Regio, eius religio - tel Roi, telle religion ». Sur un territoire donné, les sujets sont requis d'adopter la religion du Prince. Une disposition prévoit le « jus emigrandi », quoi qu'il soit parfois limité (dans le territoire des Habsbourg, tous sont requis d'être catholiques, sans droit d'émigration). Il n'y avait ni Empereur ni pape, en 1555. C'est une année d'interrègne. Cet accord est conclu entre les États d'Allemagne, sans Empereur. Dans les cités impériales (les villes libres d'Empire), les confessions catholiques et luthériennes pouvaient cohabiter, pourvu qu'elles fussent antérieures à 1555. La règle - tel roi, telle religion - reste d'application jusqu'en 1648, date du Traité de Westphalie, qui clôt la guerre de trente ans - guerre de religion entre catholiques et protestants. Finalement, la guerre de trente ans s'achève en une situation qui est celle des Temps Modernes : on s'installe dans le Confessionnalisme. En 1648, le principe « cuius Regio, eius religio » est étendu aux Calvinistes. On voit apparaître des États calvinistes : les Provinces-Unies, en Hollande. Les Princes ne peuvent plus changer de religion. Le Siège de Rome est nettement restreint en ses interventions auprès des Princes d'Allemagne. En 1648, le pape Innocent X dénonce le Traité, dans une Bulle « Zelo Domus Domini ».


- CHAPITRE LXX -
LA RÉFORME EN FRANCE


§ 1. — La conquêtede la liberté de culte par les Huguenots.

Le Protestantisme français est essentiellement calviniste. Il s'organise au Synode de Paris en 1559, sur le modèle genevois. À partir de 1560, les Protestants français sont appelés Huguenots (de Heidgenomen, « confédérés », nom des partisans de l'indépendance, à Genève). Le parti protestant français s'oppose aux De Guise, officiellement champions du Catholicisme, mais en fait - il s'agissait d'un étendard de combat, pour un combat essentiellement politique. Les Guise ont joué un rôle très négatif dans l'Histoire de France. D'autres catholiques désirent s'entendre avec les protestants.

Le Colloque de Poissy, en 1561 - qui réunissait des évêques français et des ministres protestants - colloque conduit par Théodore de Bèze, fut convoqué par Catherine de Médicis (italienne - femme d'Henri II, successeur de François Ier). Le Colloque n'aboutit pas, à cause du problème théologique de l'Eucharistie. Les protestants furent cependant reconnus, dans une certaine mesure.

En 1562, l'Édit de Saint Germain donne une relative liberté d'existence aux Protestants. Dès ce moment, ce produisirent des Guerres de Religion qui durèrent en gros trente ans, jusqu'en 1594, date de l'accession au trône d'Henri IV - devenu catholique. Ce furent des combats sporadiques dans les campagnes, plutôt des guérillas : en Champagne, à Vassy, en 1562, les gens du Duc de Guise attaquent 1200 Protestants réunis lors de l'écoute d'un sermon. Il y eut 74 morts, ce qui marqua le point de départ de la première des Guerres de Religion, jusqu'à la signature de l'Édit de Nantes en 1598, édicté par Henri IV. À partir de ce moment, il y eut une alternance de périodes de cohabitation et de conflit ouvert, avec des alliances extérieures : du côté catholique, l'Espagne de Philippe II et la papauté ; du côté protestant, l'Angleterre et les Princes allemands.

En 1570, fut conclue la Paix de Saint Germain. La liberté de culte fut accordée aux Huguenots - bien que limitée aux célébrations dans les demeures privées des nobles, est permise dans certaines villes, sauf Paris et les villes qui servaient de résidence à la Cour. Les Protestants purent accéder aux fonctions publiques. Les Protestants eurent des « places de sûreté » ou ils ont des troupes - c'est une situation de guerre froide.


§ 2. — Le Massacre de la Saint-Barthélémy (1592) et ses conséquences.

Rappel généalogique :

1) François Ier (1494 - 1515 +1547)
2) Henri II (1519 - 1547 +1559)- & - Catherine de Médicis (1519 - 1547 +1589)
3) Catherine de Médicis est mère de dix enfants, dont :
- Marguerite de Valois (1553 +1615) - & - Henri III de Navarre, futur Henri IV, Roi de France de 1589 à 1610.
- François II (mort en 1560)
- Charles IX (Roi de 1560 à 1574)
- Henri III (roi de 1574 1589).

On décide de marier Henri de Bourbon-Navarre, chef de file des Huguenots et héritier du trône de France à la mort de Henri II - avec Marguerite de Valois, pour sceller la paix nouvellement acquise. Sous Charles IX, l'amiral Gaspard de Coligny, l'un des chefs du parti huguenot, conseiller du Roi, va essayer de promouvoir une politique anti-Guise. Catherine de Médicis cherche à faire assassiner Coligny, avec l'aide du futur Henri III et de Henri de Guise « le balafré », chef de la Ligue. Mais c'est l'échec de l'attentat. Catherine décide d'assassiner tous les chefs huguenots, lors du mariage de sa propre fille Marguerite de Valois. Charles IX s'y oppose. Finalement il doit s'incliner.

Le samedi 24 août 1592 au soir, commence un massacre de trois jours : la Saint-Barthélemy, avec des milliers de morts. Coligny devient un martyr de la cause protestante. Grégoire XIII fit célébrer un Te Deum à Rome… Ce fut le point de départ de la réaction, dans toute l'Europe. Les Huguenots sont privés de leur chef. Il y a une vague d'émigration. Le peuple huguenot résiste: les quatrième et cinquième guerres de religion s'enclenchent.

En 1577 et signés le Traité de Poitiers, qui octroie de nombreuses libertés. La Ligue est fanatiquement catholique et va combattre l'accès au trône d'Henti III : c'est la « guerre des trois Henri », avec Henri de Navarre et Henri de Guise. La Ligue parvient à interdire le culte protestant, sous peine de mort, et tente de faire excommunier Henri. Le pape, intelligemment, refuse de s'allier à la Ligue. La huitième guerre de religion éclate. Henri III quitte Paris. En 1588, il fait assassiner Henri de Guise. Henri III s'allie avec Henri de Navarre pour reprendre Paris. Le peuple est délié par la Sorbonne de son allégeance au Roi. Henri III est assassiné en 1589 par un dominicain fanatique.

Henri IV part à la conquête de son royaume, et se déclare catholique à Saint-Denis. La ligue est dissoute, et la paix signée en 1598, avec Philippe : l'Édit de Nantes est proclamé. L'État accorde même une aide à l'Église huguenote. Les Huguenots ont plus de deux cents places de sûreté. Philippe Duplessis (1549 – 1623. Il est surnommé « le pape des huguenots ») est Conseiller d'Henri IV. Le pape de Rome désapprouve l'Édit, qui assura pourtant un siècle de paix à la France.


- CHAPITRE LXXI -
LA RÉFORME EN HOLLANDE


Aux XVIe et XVIIe siècles, les Pays-Bas comprennent la Belgique, Luxembourg et la Hollande. Sous le régime espagnol, se produit un essai d'expulsion du Protestantisme, par la force. Philippe II d'Espagne, fils de Charles-Quint, envoie le Duc d'Albe, qui institue le « Conseil des Troubles » (appelé aussi le « Conseil du Sang ») pour réprimer toute velléité de protestantisme : il y eut plus de mille personnes exécutées. Beaucoup de Protestants de la partie Sud des Pays-Bas émigrèrent en Angleterre et en Allemagne. Des insurrections éclatent.

Guillaume d'Orange adhère au Calvinisme en 1573 et mène la « guerre des gueux » tant sur terre que sur mer. Les Provinces du Nord sont calvinistes et interdisent le catholicisme. L'Université calviniste de Leyde est fondée. Le Duc d'Albe est rappelé. Les Provinces du Sud restent catholiques espagnoles. Les Provinces-Unies obtiennent en 1581 leur indépendance, sous la forme d'une République. Guillaume d'Orange en est le Gouverneur. La guerre se poursuivit jusqu'en 1648, date où fut signée la Paix de Westphalie, point final de la Guerre de Trente Ans. Le Traité proclame l'indépendance des Pays-Bas, devenue une importante puissance calviniste et maritime. 25 % de la population demeure catholique, mais sans moyens et persécutés. - Nous sommes au temps d'Érasme ; au milieu du XVIIe siècle apparaît la tolérance et la liberté de confession religieuse. Les Pays-Bas étaient une plaque tournante économique ou transitait le commerce de la laine anglaise.


- CHAPITRE LXXII -
ÉRASME (1469 - 1536)


Érasme influença tant la Réforme que la Contre-Réforme. Tête de file de l'Humanisme, tout en reconnaissant les abus de l'Église, il ne cède pas à l'esprit de la Réforme. Érasme était probablement un fils naturel, ce qui explique notre ignorance de ses origines exactes. Il alla à l'école à Gouda, puis alla parmi les « Frères de la vie commune », communauté mettant l'accent sur un retour à l'Évangile. Il y étudia, puis devint en 1486 Chanoine augustinien, non sans réticence.

Il lit les Classiques et les Pères. En 1492 il devient prêtre, puis obtint l'autorisation d'aller étudier à Paris. En 1499, il accompagne un de ses élèves en Angleterre. Il rencontra à Oxford John Colet, un grand humaniste et scientifique. Helléniste et exégète des Épîtres pauliniennes, John Colet influença durablement Érasme, dans le sens d'une réaction contre la scolastique, sur le plan de la méthode. Colet encourage Érasme à étudier le Nouveau Testament. Érasme revint sur le Continent, et étudia le Grec à fond. Après une nouvelle visite en Angleterre - où il traduisit le Nouveau Testament en Latin - il se rendit en Italie (1506 – 1509), où il ne trouva pas le climat intellectuel recherché. Lors de l'accession au trône d'Henri VIII, Érasme revint en Angleterre, et il habita chez Thomas More ; Invité à Cambridge, Érasme et devint professeur de Grec. Il part à Bruxelles, où il est Conseiller royal du futur Charles-Quint. En 1517, il est libéré de toute obligation envers son monastère. En 1521, il s'installe à Bâle de façon permanente, dans la maison de son éditeur : Jean Froben. En 1516, il édite le Nouveau Testament, les œuvres de saint Jérôme, saint Cyprien, saint Hilaire, de saint Ambroise, et d'Augustin. Il refuse de nombreuses offres, dont celle de François Ier, Henri VIII, etc... En 1529, il fuit Bâle, où est introduite la Réforme. Il se rend à Fribourg. En 1536, il meurt à Bâle, où il était revenu surveiller l'édition des œuvres d'Origène.

En 1500, il publia les « Adages » (proverbes grecs et latins) ; en 1509, l'Éloge de la Folie (elle servit effectivement à préparer la Réforme) ; en 1516, le Nouveau Testament avec la traduction latine ; en 1524, « de Libero Arbitrio » (contre Luther) ; en 1516, neuf volumes de saint Jérôme ; en 1522, les œuvres de saint Cyprien et des autres Pères énumérés, dont saint Jean Chrysostome et saint Irénée ; en 1532 : les œuvres de saint Basile.
Homme de vaste érudition, Érasme avait une formidable puissance de travail. Il dénonçait les abus, et s'opposer à la violence. À sa mort, Paul IV interdit ses œuvres (1558), interdit réitéré par Sixte V - longtemps, une partie de ses œuvres restera à l'Index.


- CHAPITRE LXXIII -
LE CONCILE DE TRENTE (1545 - 1563)


Le concile visait à répondre à l'idée de la Réforme, et pour réformer l'Église moralement et spirituellement. Le peuple, ainsi que l'Empereur, aspirent au concile - tandis que les papes n'y tiennent pas. En fin de compte, Paul III cède, et convoque un concile à Mantoue - concile qui est transféré à Vicenza (1536). Des oppositions politiques se présentent, et le concile est suspendu en 1539, sans avoir rien fait. Pour l'Empereur, il s'agit de s'entendre avec les Protestants, ce que ne peut accepter le pape. Le concile est convoqué à Trente, sur territoire impérial. Mais l'Empereur est en guerre avec la France. L'Empereur accorde aux Protestants le mariage des prêtres et la communion sous les deux espèces, ce qui le fait entrer en conflit avec le pape. Finalement, le concile se met au travail, discutant sur l'ordre du jour : l'Empereur veut faire passer les questions dogmatiques après les réformes dans l'Église. Le pape veut le contraire : selon son point de vue, les questions dogmatiques sont prioritaires. On décide de traiter la doctrine et la réforme en même temps. Le système des Nations est rejeté, du point de vue la procédure, et l'on revient au système des votes individuels. Le travail du concile est préparé par des Commissions, où siègent des théologiens.

De 1545 à 1547, les huit premières sessions sont marquées par une prépondérance d'évêques italiens. Lors de la session 3, le Credo de Nicée avec le filioque est reconnu comme étant la base de la foi. La session 4 affirme que l'Écriture et la Tradition sont les sources égales de Vérité religieuse. Le Concile de Trente figea les positions à l'image d'un camp retranché : seule l'Église a le droit d'interpréter l'Écriture ; la Vulgate est déclaré « canonique », c'est-à-dire comme égale à l'original (!). Les sessions 5 et 6 s'opposèrent à la doctrine protestante du Salut. Le Péché Originel fut défini suivant la position augustinienne ; il en fut de même pour l'interprétation latine de l'épître aux Romains 5 ; 12. On poussa les choses très loin, dans le domaine de la théologie des mérites et de la grâce sanctifiante. La septième session définit de façon rigide la doctrine des sept sacrements. Ces sessions traitent des études théologiques et des principes d'exégèse. Les clercs jouissant d'un Bénéfice sont assignés à résidence ; le concile établit l'obligation de la prédication.

Une épidémie éclata à Tente, et de nouvelles tensions entre le pape et l'Empereur firent que le pape transféra le concile à Bologne, pour remettre la main sur cette assemblée. Paul III suspendit officiellement le concile 13 septembre 1549, et mourut par la suite. Jules II rappela le concile en 1550. C'est la deuxième période du concile de Trente : de 1551 à 1552 ; cette période comprend les sessions 9 à 14. Les Français sont absents de cette assemblée : c'est dû à la lutte qui opposait la France à l'Empereur. L'Empereur exigea la présence de délégués protestants. La session 13 donna les décisions concernant l'Eucharistie : la doctrine de la transsubstantiation est « canonisée », parallèlement au rejet de toute autre doctrine eucharistique. La session 14 traita de la pénitence et de l'extrême-onction. La discussion avec les délégués protestants aboutit à un échec. Les Princes allemands se révoltèrent contre Charles-Quint, ce qui provoqua la suspension du concile. Cette révolte se termina avec la Paix d'Augsbourg. Sous Paul IV, l'Inquisition prit son essor. Charles Quint abdiqua en 1556, au profit de Philippe II.

Sous Pie IV, le concile est re-convoqué, en 1560. Pie IV, qui était un homme plus tolérant que son prédécesseur, envoya une invitation à Élisabeth d'Angleterre pour qu'elle permette aux évêques de Grande-Bretagne de participer au concile. La Souveraine répond qu'elle ne le peut pas, car elle n'a pas elle-même convoqué le concile - prérogative invoquée par son père Henri VIII, qui affirmait que l'Angleterre était un Empire.
La troisième période du concile dura de 1562 à 1563, et comprit les sessions 15 à 25. Maintenant, il n'y a plus d'espoir de conciliation avec les protestants. Dans cette période du concile de Trente, les Jésuites sont prédominants. Les évêques impériaux - espagnols et français - font de l'opposition.

La session 21 affirme que la Présence du Christ est totale dans chacune des espèces eucharistiques : il s'agit de la «concomitance». Cette notion servira de fondement pour refuser le Calice au laïcat. La session 22 définit la doctrine du sacrifice, dans la Messe. La session 23 légifère sur les Ordres religieux ; la session 24 traite du sacrement du Mariage, de la réforme de l'Index et de l'établissement des Séminaires. La session 25 traite du Purgatoire, de la prière aux Saints, aux reliques et aux images, ainsi que des Indulgences. En 1564, les décrets du concile sont confirmés en bloc. Une confession de foi tridentine est publiée : c'est le Credo de Pie IV. Le pape continue lui-même ce que le concile n'a pas pu achever : il s'agit de la révision de la Vulgate - travail qui se termina en 1592. En 1571, Pie V fonde la Congrégation de l'Index et publie en 1566 le Catéchisme et le Bréviaire. Celui-ci sera revisé en 1568.


- CHAPITRE LXXIV -
LA RÉFORME ANGLAISE


Nous poursuivons notre étude en considérant les éléments de la Réforme anglaise. Le problème qui se pose pour la compréhension de celle-ci est, d'une part, la récupération par le Protestantisme - ou, du côté Catholique-romain, la réduction de la Réforme anglaise à un avatar de la concupiscence d'Henri VIII… Une lecture orthodoxe de cette partie de l'Histoire offre l'intérêt d'une observation qui est faite par qui n'était pas là au moment de la controverse. Nous pouvons comprendre le mouvement de la Réforme comme étant l'essai de se redéfinir par rapport à l'Église, en tant que telle. Un Anglican, quelque soit son bord, dira de prime abord que son Église est l'église fondée par Jésus-Christ - alors que bien d'autres tenants de Confessions chrétiennes n'y viennent qu'après bien des préliminaires.

Dans la thèse protestante, nous voyons souligné le Lollardisme - extension du Wycliffisme, mouvement d'anticléricalisme au sens négatif du terme - réticence vis-à-vis du clergé établi, courant qui exista à au-travers de tout le XVe siècle.
La première étape de la Réforme anglaise est la réforme Henritienne. C'était Arthur, le frère aîné d'Henri, qui était destiné à être Roi. Henri a fait sa théologie - n'ayant aucun autre avenir que celui d'une carrière ecclésiastique. Henri était quelqu'un qui s'intéressait à la théologie ; il savait de quoi il parlait. Pendant tout le règne d'Henri VIII, il y aura une attitude intégriste, qui reflétait le point de vue catholique. Pendant son règne, rien n'a été possible en Angleterre, pour ce qui est de l'ouverture à la Réforme continentale, sauf en ce qui concerne Cramer. Mais ce dernier ne pouvait exprimer ses opinions que dans le secret de son cabinet.

La première Réforme est donc purement juridictionnelle. L'anticléricalisme lollardien justifia l'acceptation, en Angleterre, de la séparation d'avec Rome. Le clergé accepta facilement les différentes lois qui amenèrent la rupture avec Rome - , vers un système centralisé de gouvernement. Souvent, on met l'accent sur le point de vue religieux. Or ici, la Réforme religieuse est inscrite dans un mouvement très vaste, facilitée par l'anti-romaniste latent qui existant dans le peuple.

Ce n'est pas une affaire de divorce : ce qui s'est passé de 1529 à 1534 a été accepté sans discussion par les Parlements - qui avaient leur voix au chapitre - et par le pays. Les réactions furent d'origine plus économique que religieuse. Thomas More est certes un grand martyr. Il a réagi non point suite à la rupture avec Rome, mais contre la Loi de Succession. Le pape n'a pas donné l'annulation du mariage d'Henri VIII, parce qu'il était envahi par Charles-Quint, lui-même apparenté avec la femme d'Henri VIII. C'est une affaire purement politique : Charles-Quint faisait pression sur le pape à ce moment. Pendant le règne d'Henri VIII, il n'y a pas l'ombre d'une Réforme dans le sens protestant du terme.

La Réforme anglaise s'inscrit beaucoup plus dans le besoin de réforme ressenti par toute la chrétienté à l'époque - Espagne comprise, que pour effectuer différentes réformes de type continental. Dans le Catholicisme allemand et italien, toutes sortes de mouvements existaient, par exemple vers une réforme liturgique - et c'est celà précisément ce qui existait en Angleterre, à ce moment-là.

Henri VIII fit voter la « Loi des six Articles », qui est totalement intégriste : elle comporte l'obligation de croire à la transsubstantiation, ainsi que l'interdiction d'être infidèle à ses vœux. Henri VIII a supprimé des monastères qui faisaient partir de l'Angleterre vers Rome des fonds très importants. Cela eut comme conséquence la dispersion des moines. La seule chose qu'Henri VIII ait autorisé est que la Bible en Anglais soit placée à l'entrée du Narthex de l'église - mais rien de la liturgie proprement dite n'est touché. On fait en anglais des services paraliturgiques.

En 1534, se produit la séparation d'avec Rome. Cette loi se fonde sur l'idée que l'Angleterre est un Empire, et que par conséquent il est « autocéphale ». Henri VIII avait envoyé des chercheurs à la Bibliothèque Vaticane, pour tâcher de trouver des documents qui puissent montrer une filiation entre la Royauté anglaise et l'Empire byzantin : Constantin fut couronné à York... en pleine terre anglaise. Tout cela pour fonder l'idée d'Empire, contre Rome.

Édouard VI (1537 - 1547 +1553) monta sur le Trône, en même temps que ses oncles s'emparèrent du Conseil de Régence - et ceux-ci sont des protestants convaincus. Personnellement, Édouard VI n'eut guère d'influence. Les décisions furent prises par le Conseil de Régence, qui installa en Angleterre la version protestante du christianisme.
Une première période fut plutôt luthérienne, avec Cramer, qui publia tous les travaux qu'il avait faits en secret sous Henri VIII. Il avait préparé un « Livre de Prière communautaire », publié en 1549. Du point de vue doctrinal, il y a peu de choses à reprocher à ce livre. La réaction s'opposa surtout à l'emploi de la langue anglaise. La Cornouaille se souleva. Mais ils parlaient Gaélique, et non pas Anglais. Ce ne fut certes pas une réaction de type catholique - mais elle se polarisa sur la question de la langue. Pendant des siècles, les Catholiques ont prétendu que ce « Livre de Prière communautaire » était du protestantisme pur. L'intelligentsia protestantisante d'importation continentale s'y opposa également, car ce n'était pas un ouvrage réformé.
Un autre livre fut préparé, avec le concours de Martin Bucer (+1551), qui joua un rôle modérateur entre Cramer - personnalité complexe qui oscillait entre différentes positions - et John Allaskow, baron polonais, calviniste convaincu, qui joua un rôle très destructeur.

En 1552, par une deuxième mouture, très protestantisante, zwinglienne : la Cène était considérée comme une simple réminiscence, et la Communion se passe seulement quelque part entre le croyant et Dieu. Une « rubrique noire » fut ajoutée au dernier moment, et précise que l'agenouillement au moment de la Communion ne signifie nullement la reconnaissance de la Présence réelle.
Mais le Roi mourut en 1553, et le livre ne fut jamais utilisé dans l'Église Angleterre. Il ne le fut que par les exilés sur le continent, sous Marie Tudor. Mais il n'a jamais été le livre officiel de l'Église Angleterre.

Sous Édouard VI, la population reste traditionnelle. Mais sous le règne de Marie (1516 - 1553 +1558), les choses changent. Après deux ans, elle usa de son titre de Chef suprême de l'Église Angleterre pour rattacher celle-ci à Rome. Après son mariage raté avec Philippe II, elle se mit à persécuter très âprement les Protestants. Sur les bûchers, les martyrs furent entendus, et cela eu un impact populaire. Marie mourut en 1558 avec le sobriquet de « Marie la sanglante ». Cette période fut la plus déterminante pour faire avancer les idées protestantes, et notamment calvinistes. Calvin lui-même s'était intéressé personnellement à l'Angleterre. Les influences luthériennes sont très réduites en Angleterre. Tous les exilés furent en contact essentiellement avec les Zwingliens et les Calvinistes. Environ huit cents exilés revinrent sous Élisabeth (1533 - 1558 +1603), avec le verbe haut... Mais Élisabeth avait un épiscopat catholique - quoique décimé. Les évêchés vacants sont tout de suite repris par ceux qui revenait de Genève. La papauté eut une attitude très réservée.

Dans les premières mesures de son règne, Élisabeth fit voter un nouveau Livre de Prières. Henri VIII, le père d'Élisabeth, s'était proclamé Tête de l'Église d'Angleterre : le Roi prenait la place du pape - pour des raisons impériales. Élisabeth, face au catholiques - et tous se considéraient comme tels malgré la rupture - le corrigea, et se déclara non plus « Tête » mais « Gouverneur » de l'Église, comme le fut l'Empereur byzantin et Charlemagne ; c'était une chose acceptable pour Rome. En ce qui concerne le Livre de prières, elle ne fit pas un retour à 1549, mais composa un nouvel amalgame : celui qui communie affirme à la fois la Présence réelle et la valeur de signe du sacrement. La réforme de 1559 alla davantage dans le sens catholique que protestant.

L'opposition protestantisante se développa, avec l'apparition des « Puritains » qui considéraient qu'il fallait pousser vers Genève - supprimer l'épiscopat, réformer le culte et la doctrine, dans le sens de la prédestination, du rejet des œuvres, etc... Jusqu'à la mort d'Élisabeth, les Puritains restèrent dans l'Église d'Angleterre, à part certaines communautés congrégationnalistes qui se mirent à mener leur propre existence séparée. Plus tard, les Baptistes apparurent parmi ces mêmes Puritains. Des évêques étaient de cette tendance, pratiquement anti-épiscopale : ils avaient une conception minimale de l'épiscopat. Cette opposition ce développera pendant les deux règnes suivants, jusqu'à mener à la Révolution anglaise.

L'autre partie de l'opposition contre l'Église d'Angleterre provient du Catholicisme, avec deux phases : jusqu'en 1570, la papauté courtise Élisabeth et l'invite à envoyer ses évêques au concile de Trente - ce à quoi Élisabeth répondit qu'elle ne pouvait pas envoyer ses évêques à un concile qu'elle n'avait pas convoqué… Dans ce sens, un concile qui n'est pas convoqué par un Empereur ne peut être reçu. - Le Livre de Prières, traduit en latin, fut l'une des propositions sérieuses de réforme liturgique, à Trente. C'est significatif : pendant assez longtemps, on a prie la situation anglaise comme une porte de sortie possible pour les impasses qui se refermaient sur le Continent.

La deuxième phase de l'opposition du Catholicisme contre l'Église d'Angleterre survint en 1570, lorsque Pie V (canonisé par l'Église romaine) excommunia Élisabeth - ce qui fut une bourde politique majeure - libérant ses sujets de l'allégeance : tuer la souveraine n'était pas un crime, dans l'optique de l'époque… Cela mit les Catholiques anglais dans une situation impossible. Sur le continent, des Collèges se forment pour donner des prêtres afin de reconquérir l'Angleterre au Catholicisme : le Collège de Whims à Reims, et le Collège de Dorway à Douai. Les Jésuites étaient plus avisés, dans leur politique envers l'Angleterre : ils défendaient une politique de compromis. En 1588, se produisit l'essai de l'invasion de l'Angleterre par l'« Invincible Armada » - à la suite de l'exécution de Marie Stuart. Quand l'« Armada » fut détruite, personne ne s'est rendu compte que les Anglais avaient en fait gagné la bataille. Seul le pape a vu l'importance de la défaite espagnole ; il n'avait béni que de mauvais gré l'entreprise de l'« Armada ».

Le règne d'Elizabeth fut une période qui, du point de vue doctrinale et liturgique, se cherche. C'est la quête d'une Réforme qui soit toujours « sui generis », et qui se réclame sans cesse du Premier Millénaire de l'Église. Le terme d'« Église anglicane » n'a acquis le sens actuel qu'au XIXe siècle : c'était en fait l'Église de la terre anglaise. L'Anglicanisme est un terme apparu au siècle dernier. L'Église d'Angleterre veut se référer à l'Église des Conciles - au moins les quatre premiers - plutôt qu'à une primitivité extrême, celle des temps apostoliques - auxquels se référaient les Réformés du Continent. En Angleterre, il s'agit d'une « via tertia », la recherche d'un Catholicisme non-romain, d'avant la Séparation.

L'âge d'or de l'Anglicanisme est le début du XVIIe siècle, avec l'arrivée de Jacques Ier. C'était un vrai théologien ; il fut élevé en Écosse. À la fin du XVIe siècle, l'étude des langues anciennes se développe. La Bible anglaise paraît en 1611. Entre 1590 et 1630, il y a une vraie Renaissance patristique, avec comme chef de file Lancelot Andrews. En 1625, Charles Ier, le fils de Jacques Ier - homme peu fait pour le métier de Roi - mit fin à cette éclosion, encourageant la réaction puritaine, précipitant l'évolution vers la Révolution de 1642. Pendant ce temps se développèrent des sectes, tels les Quakers et autres. En 1660, avec la restauration de la Royauté, l'aile protestantisante quitte l'Église Angleterre - et est exclue de la vie politique, en même temps que tout ce qui est Catholique.

Tout le XIXe siècle sera le cadre de la lutte pour rendre à chacun la place qui lui revient, avec les séquelles qui existent aujourd'hui encore, envers les Catholiques. Dans l'Anglicanisme, il y a une référence nécessaire à l'éclosion du XVIIe siècle - acceptant implicitement la Tradition. Et à l'inverse, c'est une Église qui hérite d'une situation historique comparable à une cote mal taillée - c'est une Église d'État qui est minoritaire face à l'ensemble des autres Confessions protestantes en Angleterre.


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